Parmi les milliers de marques de voitures qui ont sévi dans le monde depuis l’apparition de l’automobile à la fin du XIXème siècle, nombreuses sont celles qui n’ont pas dépassé un an d’existence et dont le nom n’est jamais passé à la postérité !
Pourtant, une de ces marques a cependant marqué son époque et est restée dans les mémoires des connaisseurs, c’est la marque américaine Tucker qui ne produisit que 51 exemplaires d’un seul modèle, la 48.
Preston Tucker (né le 21/09/1903, décédé le 26/12/1956) est obsédé par les automobiles dès son plus jeune âge. Il apprend à conduire à 11 ans, à 16 ans, il commence à acheter des modèles récents, les répare voire les rénove et les revend à profit. Il abandonne l'école et obtient un emploi de garçon de bureau pour la Cadillac Motor Company. En 1923, avec sa nouvelle épouse, Vera, ils prennent un bail de six mois pour une station-service. Vera gère la station pendant la journée, pendant que Preston travaille sur la chaîne de montage de la Ford Motor Company. Pendant les deux derniers mois à la station-service, Tucker commence à vendre des voitures Studebaker. Le bail expiré, Tucker quitte Ford et après un court retour dans la police qu’il avait quittée à 19 ans, il est embauché par un vendeur d’automobiles, Michael Dulian, qui deviendra plus tard directeur des ventes de Tucker Car Corporation. Quelques mois plus tard, Dulian, impressionné par le succès immédiat de Tucker en tant que vendeur, invite Tucker à déménager avec lui à Memphis pour y occuper un poste de directeur des ventes. Tucker devient représentant chez Ivor Schmidt (Stutz) et John T. Fisher Motor Company (Chrysler), où il devient directeur général des ventes. En même temps, il établit une connexion avec Pierce-Arrow pour qui il devient directeur régional des ventes en 1933. En 1935, il retourne à Détroit et travaille comme vendeur Dodge pour Cass Motors.
Au début des années 1930, intéressé par les voitures de course et leurs concepteurs, Tucker rencontre Harry Miller, fabricant plus de moteurs vainqueurs aux 500 miles d'Indianapolis que tout autre au cours de cette période. Meilleur ingénieur que commerçant, Miller se déclare en faillite en 1933 et est à la recherche de nouvelles opportunités. Tucker persuade Miller de le rejoindre dans la construction de voitures de course. Ensemble, ils fondent Miller and Tucker, Inc. en 1935. Leur première tâche d'ambition est de modifier dix moteurs V8 pour Henry Ford, car ils veulent convaincre Edsel Ford, puis son père Henry, de construire une voiture de course dérivée des Ford V8 de série, pour l’édition 1935 d'Indianapolis. Miller et Tucker, Inc. poursuivent le développement de voitures de course et diverses autres entreprises jusqu'à la mort de Miller en 1943. Tout en travaillant avec Miller, Tucker rencontre les frères Chevrolet et le mécanicien et ingénieur en chef, John Eddie Offutt, qui l'aidera plus tard à développer et à construire le premier prototype de la Tucker '48. La personnalité extravertie de Tucker et son implication à Indianapolis le font connaître dans l'industrie automobile dès 1939.
À la fin de 1937, Tucker a l'idée de développer un véhicule blindé de combat à grande vitesse. Son opportunité vient du gouvernement néerlandais, qui souhaitait un véhicule de combat adapté au terrain boueux des Pays-Bas. Poursuivant ses relations de travail avec Harry Miller, Tucker commence à concevoir une voiture de combat blindée à empattement étroit équipée d'un moteur Packard V-12 modifié par Miller. La voiture est surnommée le "Tucker Tiger". Au moins un prototype de la voiture de combat a été construit. Les Allemands envahissent les Pays-Bas au printemps 1940 avant que Tucker ne puisse finaliser la transaction et le gouvernement néerlandais perd alors tout intérêt. Tucker finalise les prototypes et choisit de tenter en vain car “trop rapide” de vendre le véhicule au gouvernement américain. Toutefois, il se fit une petite fortune avec la mise au point d’une tourelle de tir à canon rotative extrêmement mobile et motorisée de la voiture de combat Tucker, connue sous le nom de "Tourelle Tucker", qui a suscité l’intérêt de la marine américaine.
le Tucker Tiger et sa tourelle Tucker
En 1944, Tucker lança une audacieuse campagne de financement pour construire une berline très innovante, la Tucker '48. Il réussit à louer l'usine de moteurs d'avions Dodge-Chicago, fermée depuis la fin de la guerre, mais il n'y produisit que 51 exemplaires au lieu des 1000 prévus pour le millésime 1948.
Cette grande berline de 5,30 mètres (empattement de 3,30 mètres), d'une largeur de 2,08 mètres, pesant 1921 kg, dessinée par Alex Tremulis a une finesse aérodynamique (Cx) de 0,30, un troisième phare central directionnel, des ailes avant profondément échancrées et des portes de type « autoclave ». L'habitacle remarquablement spacieux est meublé de deux banquettes dont les coussins sont interchangeables « pour égaliser l'usure ». Le tableau de bord est capitonné, le pare-brise est éjectable, la carrosserie est déformable (pour absorber l'inertie d'un choc) et des ceintures de sécurité sont prévues. La suspension est indépendante aux quatre roues. Le moteur placé à l'arrière est un six cylindres à plat à soupapes en tête de 5473 cc en aluminium dérivé de celui d'un hélicoptère Bell auquel on a ajouté un refroidissement par eau. Ce moteur de 166 chevaux est couplé à une boîte semi-automatique à quatre vitesses à présélecteur Cord et procure à cette propulsion des performances à faire rougir ses rivales : 193 km/h en vitesse de pointe et un chrono de dix secondes pour boucler le 0 à 100 km/h. À l'origine les freins sont à disque, le moteur est doté d'injecteurs et la transmission est automatique. Mais des dispositifs plus ordinaires sont finalement installés. Le moteur est démontable en une demi-heure.
Mais en 1949, la commission de surveillance de la bourse le mit en accusation, car beaucoup des promesses de propositions techniques sophistiquées ne furent pas maintenues. Il accusa pour sa part les « trois grands » de l'automobile (General Motors, Ford et Chrysler) de chercher à le couler. Il fut finalement innocenté, mais les difficultés financières placèrent sa société en liquidation.
47 exemplaires sur les 51 de la Tucker ‘48 existent toujours, un fut la propriété de George Lucas avant qu’il ne la revende, et deux autres appartiennent à Francis Ford Coppola. Quant au futur coupé Talisman, il ne dépassa jamais le stade de la table à dessin.
Très rares et très convoitées, les Tucker 48 ne possèdent pas de cote officielle. L’une d’elle vendue aux enchères en 2012 à Scottdale a trouvé preneur pour 2 915 000 $, tandis qu’une autre, visible dans le film “Tucker”, vendue aux enchères en 2020 toujours à Scottsdale partait à 2 040 000 $.
Tucker 48 vendue 2 915 000 $ – Tucker 48 vendue 2 040 000 $
Si plusieurs films ont pour personnage principal une automobile (Christine, Un amour de coccinelle, Chitty Chitty Bang Bang, Retour vers le futur, Duel, Pink Cadillac, La Belle Américaine, Le Mans, etc.), je ne sais pas s’il existe beaucoup de films portant le titre de la marque dont elle narre l’histoire.
Francis Ford Coppola réalisa le film “Tucker” en 1988 avec Jeff Bridges dans le rôle du constructeur de la marque éphémère. Son ami George Lucas, amoureux de longue date des belles voitures, coscénarisa et coproduisit le projet.
Le thème : En 1948, le jeune ingénieur américain Preston Tucker conçoit une automobile révolutionnaire qu'il baptise de son nom. Le succès prévisible déclenche une contre-attaque immédiate des trois grands constructeurs, General Motors, Chrysler et Ford, pour tuer le projet dans l'œuf. Mais Tucker est décidé à ne pas se laisser faire et à réaliser son rêve : il doit absolument réaliser cinquante exemplaires de sa voiture pour que celle-ci existe de fait...
Les voitures du film :
les Tucker : Tucker Tiger et la Tourelle Tucker
l’enseigne – dessin de la Tucker 48 – présentation de la Tucker 48
les 50 Tucker produites (dans le film)
les autres voitures : Buick et Ford T 1927 – Miller-Tucker Special – Lincoln Continental 1941
Plymouth De Luxe 1937 – voitures de la casse – Cadillac Fleetwood 60 Special 1940
Pontiac De Luxe Torpedo 1941 – Plymouth De Luxe 1940 et Ford V8 De Luxe 1935 – Buick Roadmaster 1940 et Ford V8 De Luxe 1937
Mercury Eight Station Wagon 1942 – Ford 1941 de la police – Dodge Luxury Liner Special 1940 taxi
Les personnages du film :
Preston Tucker – Vera Tucker – Preston Tucker Junior
Marylin Lee Tucker – Noble et Johnny Tucker – Abe Karatz
Eddie Bean – Jimmy Sakuyama – Alex Tremulis
Millie – Floyd Cerf – Oscar Beasley
R.J. Bennington – la secrétaire de Bennington – le sénateur Ferguson
Howard Hughes – l’attaché de presse Frank – les Tuckerettes
Stan – le maire – la petite fille de la publicité
le pompiste – le policier – le juge
le procureur Kerner – Kirby, l’avocat de Tucker – le jury
Sans tenir le rôle principal la Tucker 48 est apparue dans deux autres films (sources IMCDB) :
Tucker 48 dans Retour en force (USA, 1997) – Tucker 48 dans Sin City : J’ai tué pour elle (USA, 2014)
J’ai eu l’occasion de voir une Tucker 48 au salon Rétromobile en 1996.
Dans ma collection de voitures miniatures se trouvent une Tucker de la marque Solido au 1/43ème ainsi qu’un pin’s de la collection des Editions Atlas :
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